Le type a sorti un fusil à pompe de dessous son comptoir, et dans la seconde qui a suivi, Kovac, ce putain d’enfoiré, s’est barré comme une petite fiotte. Et je me suis retrouvé seul face à l’adversité…
« T’as trois secondes pour foutre le camp… ou j’te crève… !
— …Y’aurait pas moyen de discuter un peu, m’sieur… ?!
— Discuter… ?! Et de quoi tu voudrais qu’on cause tous les deux ? De ta mère qui devait être une sacrée salope… ou de ta tronche en trou d’pine ?!
J’enlève ma cagoule. J’ai chaud. Et puis ça gratte la mort, la laine vierge.
» Ma mère… ? Mais j’lai pas connue, m’sieur… ! J’suis d’la Dasse, moi… !
— La Dasse ? Et alors… ?! J’en ai rien à foutre moi de ta vie, ptit’con… ! Allez gerbe d’ici avant que j’te…
— M’sieur… faut pas vous énerver comme ça… ! On voulait pas vous faire de mal avec mon pote… y’a que vot’fric qui nous intéresse… Regardez… mon gun… c’est du plastoque… !
Avec Novak, c’est la seconde fois cette semaine que ça tourne vinaigre nos affaires. Avant-hier, c’était chez Momo, l’épicier de la rue Farfadelle. Y nous a coursés jusqu’à Saint-Ouen, le Momo… un vrai lévrier Kabyle… ! Alors j’en peux plus, moi, de toutes ces conneries. Faut qu’ça cesse…
« …Et puis merde… allez-y… tirez… ! J’en ai plus rien à foutre après tout… Tire, le gros… tire donc, qu’on en finisse… !
Le vieux est surpris. Il a l’habitude de se faire braquer, mais là, il sent bien qu’il y a quelque chose de pas normal qu’y se passe…
« …Bon… Tu vas te barrer maintenant… ? Allez, barre-toi que j’te dis… !
— Non ! Je reste… crève-moi… et on en parle plus… !
J’écarte largement les bras. Pas envie qu’il rate son tir, préfère mourir sur le coup.
« Et vise bien le cœur… J’veux pas souffrir !
Le type baisse son arme. Je crois qu’il se dégonfle, ce con. Sur l’ardoise, derrière lui, c’est écrit à la craie blanche : « La mêson ne fait plus crédit ».
« Pas chargé…
— Quoi… ?!
— Y’a pas de cartouches dans mon Riot… ! Toujours vide… pas envie d’avoir des problèmes…
— What… ?! Des problèmes… ? Môsieur a pas envie d’avoir des problèmes… ?! Mais je rêve, là ! Nom de Dieu de nom de Dieu, à quoi ça sert d’avoir une arme si elle est pas chargée… ?! Faut-y êtes trop con, quand même… !
— Et faire un braquage avec un flingue en plastique… tu crois que c’est plus malin, ça… ?! Allez petit… remets ta cagoule et fiche le camp… j’appellerai même pas les flics… !
Une bonne femme rentre sans prévenir dans le bar. Je la reconnais, c’est la vieille qui fait le ménage dans notre cage d’escalier, à la cité des Quat’vents. Simone, qu’on l’appelle. Elle enlève son pardessus en poil de chameau et s’installe tranquillement à une table…
« …Un ptit’blanc casse, Mimile… comme d’ab’… !
— … Oui… C’est comme si c’était fait, M’dame Leguennec… ! Bon… et on fait quoi maintenant tous les deux… ? T’es sûr qu’tu veux vraiment mourir aujourd’hui, l’orphelin… ?!
— Et mets donc z’en un aussi au p’tit, Mimile… m’a pas l’air en forme… l’est blanc comme un linge, ce gamin… !
Kovac, y passe me voir de temps en temps au bar. Lui aussi, il s’est rangé des voitures. Y bosse comme plongeur au Mac’Do maintenant. Quant à Mimile, il gueule tout le temps après moi, mais y dit que c’est pour mon bien. Et je crois bien que je vais finir par le croire…
Une de trop.
Ma participation à un défi sur SCRIBAY. Simplissime : Une seule phrase : la dernière juste avant de mourir… !
Le Décor :
Ma chambre, lit King size, draps en coton tout frais qui sentent bon.
les Personnages :
-Ingrid (26 ans. 1,68 m. danseuse au Crazy Horse (nom de scéne : « Lolly Pop »)
-Pamela (24 ans. 1,65 m. Actrice. 95c.)
-Félicia (32 ans. 1,72 m. Prof de yoga. très souple.)
-Moi, Ernest (99 ans. écrivain à succès, alias « le taureau du Finistère »)
Et la Phrase ultime :
« Oh, non… Laissez-moi quand même un peu souffler, mes petites chéries… c’est la treizième fois qu’on remet ça cette nuit… ! »…
Le Monde d’avant.
Banlieue de Panam sur Crasse. Bien longtemps après les périodes troubles dites du Grand Confinement…
« … Fais chier, tiens… ! »
Il bruine encore. J’ai déjà foutu en l’air deux pébrocs cette semaine avec ces saloperies de pluies acides qui vous bouffent tout jusqu’à l’os. Tandis qu’un néon violet grésille de l’autre côté de la rue dans l’enseigne d’un Lavo’matic, un loquedu en haillons s’accroche à l’un des seuls réverbères fonctionnant encore dans ce quartier. Tout par ici est glauque, sale, minable, délabré, et semblable à ce que l’on peut découvrir ailleurs, dans cette ville immonde. Un vrai trou à rats.
Les gars de la Scientifique sont déjà sur place :
« Bonjour chef… C’est pas beau à voir… ! Oubliez surtout pas d’enfiler des chaussons ! »
J’entre dans la boutique. Une vieille femme attend, pliée en deux sur une chaise bancale.
« …C’est vous, la patronne… ? »
— Ouais… et toi, j’parie que t’es le petit fouille-merde de service !
— Hey… on se calme, la viocque ! Gaffe quand même, il est jamais trop tard pour une distribution gratuite de mandales… ! Alors, c’est quoi ici ?
— Une librairie, ma bille ! Tu sais p’têt pas lire… ?! C’est marqué en gros à la peinture rouge au-dessus de la porte !
— …Non… j’sais pas lire, mais j’t’emmerde, Toutânkhamon ! Bon… où c’est qu’il est ce macchabée… ?!
Elle me montre une large traînée d’hémoglobine sur le parquet à chevrons.
— Pas compliqué… y’a qu’a suivre la ligne rouge !
Elle se déplie en craquant et se lève péniblement de sa chaise. Un vrai sac d’os.
— Et y s’est passé quoi exactement, ici ?
— Attaque à main armée… !
Elle chope une canne en bambou posée dans un coin, et s’avance vers moi. Elle me fiche drôlement les jetons cette vieille peau…
» Attaque à main armée… ?! Pour la caisse… ?
— La caisse… ? Tu rigoles, mariole ?! Y’a jamais eu plus de vingt-cinq balles d’un coup dans la caisse… ! Non, mon mignon, c’est pour un bouquin tout ce tintoin…
— Un bouquin… ?!
— Suis-moi… j’t’expliquerai en route…
Elle passe devant. On pénètre dans une deuxième pièce. Et j’ai pas à chercher longtemps, la victime est là, en plein milieu, allongée de tout son long et qui baigne dans son jus écarlate.
« Il s’est traîné jusqu’ici… un drôle de coriace, le Marcelino !
— Marcelino… ? C’est qui çui-là… ton homme ?
— Mon homme… ?! Dis-donc, l’inspecteur machin chose, est-ce que t’as bien reluqué ma trogne, ou pas… ?! J’ai cent cinquante deux balais… alors j’peux te garantir qu’il y a un sacré bail que les mâles s’intéressent plus à moi… !
— Cent cinquante deux… ? Vous les faites pas… !
— Parce que tu m’as pas vu à poil, Du con… !
— Bon… Alors, c’était qui, ce Marcelino ?
— Mon beau-frêre… Il me donnait un coup de main dans la boutique… Pas très malin, un peu comme toi, mais qui rechignait pas à la tâche ! Je vais le regretter, le Lino…
— Et toi, t’étais où, l’ancêtre, au moment du drame ?!
— Aux chiottes ! Mais j’ai tout entendu… ! J’y vois plus très bien mais pour le reste ça fonctionne encore pas trop mal !
— Z’étaient combien pour faire le coup… ?
— Un seul ! Mais un costaud sûrement… Le Marcelino, il a bien essayé de se défendre mais faisait pas le poids, l’allumette… !
Je me penche sur le corps sans vie. Il est sur le ventre, alors je le retourne un peu pour mieux y voir. Et v’là que ses boyaux lui sortent du bide par une jolie ouverture. Ça mousse et ça schlingue fort…
« Ô ben, merde… ! Il avait pas mangé qu’des savonnettes, ton Marcelino… !
— Voyons… un peu de respect pour les morts, jeune trouduc ! On fait comme tout le monde… on bouffe c’qu’on trouve, nous aussi ! Quand y’a que des cafards à becqueter, on fait pas les fines bouches !
Splendide éventration en tout cas. Du bel ouvrage, dans les règles de l’art, un travail de pro sans aucun doute. Et ça me change des règlements de compte entre dealers de schnouffe, à coup de barres de fer. La bouillie, c’est pas vraiment mon truc, je préfère quand c’est bien propre et net. Comme là.
« Bon… c’est quoi alors, cette histoire de bouquin ? Accouche, la vieille, qu’il se fait tard maintenant !
— Une édition rare… doit pas en rester plus de deux ou trois exemplaires sur la planète…
C’est vrai que je sais pas lire. Mais on n’a plus besoin de ça maintenant. De nos jours, y’a plus que les vieux schnocks qui lisent encore…
« Du pornographique ? Tu sais bien que c’est interdit par la loi martiale, la rombière ! Tu risques gros pour ça… !
— Mate donc encore un peu mon cul, le flicaillon… et vise bien droit ! Le graveleux, c’est pas le genre de la maison, on est des gens honorables, nous ! Alors si c’est le touche-pipi qui t’intéresse : va falloir t’adresser ailleurs, peau de zeb ! »
Je lui mettrai bien une claque, ou peut-être même deux, mais j’ai peur de la tuer sur le coup, la momie. J’ai jamais su doser ma force quand je me mets à secouer les gens. J’aimerais pourtant qu’on en finisse, je commence à avoir grave les crocs, alors je me décide à lui faire les gros yeux, histoire de gagner du temps…
« Et si je te foutais au gnouf pendant quelques jours, en attendant qu’on dégorge tout ça… ?! Hein… le gnouf… ça te dirait pas un petit séjour au gnouf, la limace… ?!
— Joker… ! J’appelle mon avocat ! Une pointure du barreau, mon baveux, un grand spécialiste des doigts dans le fion pour calmer les nerveux dans ton genre… Alors on touche pas à mémé, le cowboy… j’ai des relations, moi !
Je sens bien que je perds patience. La vieille est coriace. Faut que j’abrège la conversation avant de choper une migraine tenace.
« …Bon… Revenons-en à l’objet du délit… ce bouquin… c’est quoi ce putain de bouquin… ?!
— « Histoire du Monde d’avant »… sur grand papier… du filigrané… doux comme d’la peau de couilles… !
— Ouais… et ça cause de quoi… ?!
— Mais… tu fais pas semblant, alors… t’es vraiment con comme une… ?! »
Là, c’est parti. Une beigne. Direct dans le pif. Y’a un moment tout de même où les nerfs ils peuvent vous lâcher…
« Bon… compteurs à zéro… on reprend tout depuis le départ, Mamie « Je sais tout » ! »
Elle toussote, renifle, et puis crachouille un glaviot sanguinolent. Je lui tends mon mouchoir, j’ai du savoir-vivre.
» J’te préviens… si tu m’as pété le nez, je porte plainte… !
— Et moi, dans deux secondes, je te casse une patte… la droite, ou la gauche… ? Alors, ça cause de quoi ton grimoire ?
— Le Monde d’avant… merde… c’est pourtant bien assez clair comme ça, non ?!
— Tu veux dire d’avant… avant le Grand Confinement… ?!
— Tout juste, Sherlock ! De la bombe, ce bouquin… !
— Y paraît que les gens étaient vachement heureux en ce temps là… C’est ma mother qui m’a un peu raconté, juste avant de crever…
— T’as eu une mère, toi ?! Pourtant, avec cette tronche tout en biais… je penchai plutôt pour une éprouvette en Pyrex ! Comme quoi, même avec l’habitude, on peut s’gourer !
— Et… y’avait des images… ?!
— Hein… ?
— Dans ton book, la vieille… y’avait des images aussi… ?!
— Un peu, qu’y avait des images ! et en couleur même !
— En couleur… ?
Alors, elle m’a tout expliqué. Tout. Absolument tout ce que l’on nous cachait maintenant. Les champs de blé qui ondulent au vent, la mer bleue, les oiseaux qui chantent, les feuilles vertes dans les arbres, les papillons qui papillonnent, et même les grillades sur les barbeuques entre amis…
— Si tu savais, ma pomme, comme c’était bon une merguez bien grillée… !
Au bout d’un moment, les gars de la Scientifique se sont décidés a foutre Marcelino dans une housse en plastoque. Puis, à éponger le sang qui faisait tache. Mais, nous deux, avec ma vieille peau, on a discuté encore, encore, et encore… Toute la nuit.
Au petit matin, j’ai dû partir, mais à regrets.
« Allez… fais-moi donc un bécot sur le front avant de t’en aller… comme les gens qui s’aimaient s’en faisaient plein avant… dans le temps… ! »
Avant de la quitter, sur le pas de la porte, je me suis retourné…
« Dis, la fripée… ton bouquin… c’est qui déjà qui l’avait écrit… ?!
— Salgrenn… Ernest Salgrenn… allez… file… file maintenant, mon beau gosse… !
Coup de pouce.
Une fois n’est pas coutume… Et ce n’est pas par manque d’inspiration, rassurez-vous (!), mais aujourd’hui, je voudrais vous causer de deux sujets qui n’ont absolument rien a voir avec mes petites nouvelles.
Tout d’abord un énorme coup de cœur pour l’humoriste SOPHIA HARAM, et son billet hebdomadaire sur les ondes de FRANCE INTER . Je la trouve remarquable… voilà c’est dit !
Par ces temps difficiles où l’on* applaudit, en soirée le plus souvent, le courage de nos soignants et de tous les autres professionnels qui bossent en prenant souvent des risques pour eux-mêmes ainsi que pour leur famille, il y a d’autres personnes, tout aussi remarquables, et dont on ne parle quasiment pas : il s’agit de ces bénévoles qui continuent eux-aussi à s’occuper des animaux dans les refuges. Ces refuges pour animaux sont malheureusement très nombreux, et je ne peux pas tous les citer ici. Je n’en citerais donc qu’un seul qui a attiré un peu plus mon attention : « La TANIÉRE » , Zoo-Refuge du côté de CHARTRES (28). L’adresse Web : https://www.lataniere-zoorefuge.fr/ Ils ont évidemment besoin de notre soutien… Merci !
Je vous rappelle également que les 20 premiers chapitres de mon roman : Le Coup du Dodo sont en lecture (gratos !) sur SCRIBAY …
*Nous, les petites gens (avec ou sans dents…) qui savons ce que ces sacrifices veulent dire…
La boite aux chaussons.
Un début d’été, je m’en souviens très bien…
La première fois que je l’ai rencontrée, elle portait robe légère, à grands motifs floraux, collier d’or, et montre fine, identique à celles qu’on offre aux Premières Communiantes. Ce soir-là, le doux soleil de juin jouait les prolongations dans sa chevelure d’ange, et ses escarpins blancs piétinaient joyeusement le gazon. Oui, de tout cela, j’ai le parfait souvenir…
Elle avait peut-être trente-cinq ans, et moi, dix de moins. Ou plutôt l’inverse, je crois, mais elle m’intimidait tellement. Pourtant, j’aurais fait n’importe quoi pour attirer son attention. Absolument n’importe quelle folie, comme gravir cette très haute montagne, là-bas, loin derrière nous, puis sauter dans le vide, sans hésitation, en hurlant « Vive la vie ! », ou bien marcher sur les mains, ou peut-être même assassiner quelqu’un, sauvagement… qui le sait… ? Ce soir-là, ce merveilleux soir d’été, j’aurais fait n’importe quoi d’insensé pour qu’elle s’intéresse seulement un peu à moi.
Alors, j’ai bafouillé, renversé mon verre de punch, raconté des tas d’histoires idiotes, fait le malin plus que les autres, comme souvent. Mais, je sais si bien le faire. Et elle a ri. Elle a ri à toutes ces bêtises, à ma lourdeur, et surtout à cette timidité qui m’empêtrait tant. Elle a ri de moi à pleines dents et ma vie a basculé. Plus rien ne serait désormais comme avant.
Notre idylle a duré quelques semaines. Un été à peine. Mais le plus bel été depuis que les étés existent sur Terre. Je savais maintenant presque tout d’elle. De son corps, de son âme. De ses petits secrets aussi. Sa peau était mon livre de lecture préféré. Je connaissais par cœur tous ses grains de beauté. Je lui ai fait l’amour. Maladroitement. Je la trouvais si belle, et je le lui disais souvent. Trop peut-être…
Je me souviens aussi de cette boite, pleine de petits chaussons de danse… Ses premiers chaussons… Et puis de ses yeux verts…
J’aurais fait n’importe quoi encore, mais cette fois pour la garder près de moi. Elle adorait les voitures de sport ; alors je trouverais bien assez d’argent pour lui en offrir une. Et puis je l’emmènerais au bout du monde, très loin d’ici, là où je pourrais la couvrir de bijoux, de perles nacrés, d’émeraudes, de fleurs exotiques… Je prendrais soin d’elle… toujours… oui, pour toujours… je le lui promettais, je me le jurais à moi-même…
Mais voilà, toujours ne rime jamais avec amour, jamais, et il est revenu.
Lui. Être insignifiant, sans aucune envergure, désolant de banalité, minable, tellement haïssable…
Pourtant, elle l’aimait. Lui. Et lui seul.
Un soir, je les ai surpris. J’attendais dans ma voiture, devant chez elle. Elle m’a vu, alors, elle est sortie…
« Qu’est-ce tu fais là… voilà que tu me surveilles maintenant… ?! a-t-elle dit
— Et lui… que fait-il ici, lui… ?!
— Il veut me parler… On doit s’expliquer… tu comprends…? » m’a-t-elle menti.
— Mais, je croyais que c’était fini… ?
— Oui… c’est fini… » m’a-t-elle avoué…
Ensuite, j’ai attendu. Toute la nuit. Pour la tuer. Mais, on ne tue pas les gens qu’on aime… et ce révolver me brûlait les doigts. Celui de mon grand-père. Un héros, lui. Un héros bien discret qui avait refusé toutes les décorations : « Crois-tu que j’ai fait tout ça pour leurs babioles ! On ne crève pas les gens pour une médaille ! On le fait seulement pour protéger les siens, sa femme, ses enfants, ses amis, son pays parfois…»
Alors, je suis resté, mais pour le tuer lui, cette fois…
… J’entends ses pas sur le trottoir. Il ne m’a pas vu, caché dans un recoin, et il s’approche sans méfiance de sa voiture. Dans ma poche de manteau, j’ai fait sauter à tâtons le cran de sécurité du révolver, et je m’avance. Il met le moteur en marche. Je suis à deux mètres à peine maintenant, mais il ne me voit toujours pas. Je sors mon arme, et puis je vise, la tête. Il n’a aucune chance de s’en sortir à cette distance. Il va pour démarrer, alors je tire…
Je l’ai revue. Bien plus tard. Vingt-cinq ans plus tard. Elle a changé. Évidemment, comme tout le monde après vingt-cinq ans. Elle porte des lunettes aujourd’hui. Et elle a pris un peu de poids aussi. Ses deux grossesses, l’abus de chocolat peut-être, l’arrêt définitif de la danse plus sûrement… mais ses yeux sont toujours verts. Deux belles émeraudes scintillantes.
De loin, elle m’a reconnu, elle aussi, et s’est avancée vers moi, un peu gênée.
« Mais qu’est-ce que tu fais là ?! Je te croyais loin… à l’autre bout du monde… !
— Je suis revenu… fatigué de la belle vie ! Tu sais, on se lasse de tout… !
Elle rit. Et le Monde bascule encore.
— … je voulais te dire quelque chose…
— Quoi donc… ?
— Cela fait si longtemps… mais malgré tout… je voulais te demander pardon… oui… pardonne-moi, s’il-te-plaît… pardon… »
Le voilà maintenant, lui, ce misérable parmi les misérables qui ne sait même plus qui je suis, ou en tout cas fait tout pour feindre de l’ignorer. Alors, je lui parlerai bien volontiers du révolver qui se trouve toujours dans ma poche. De ce même révolver qui s’est enrayé, à l’aube, un matin de septembre, il y a tout juste vingt-cinq ans. De ce vieux révolver, que je jetterai dès demain.
Parce qu’on ne peut pas vivre toute une vie comme cela, une arme cachée dans la poche…
Comme un pet sur la toile.
J’ouvre les volets de ma chambre. Et ils sont là…
« Salgrenn ! Salgrenn ! on t’aime ! on t’aime… ! »
Je referme quasi immédiatement. Ce n’est pas grave, j’ai pris l’habitude de vivre dans la pénombre.
La Police les déloge bien deux fois par semaine, le mardi et le vendredi, mais dès le lendemain ils sont de retour. Pourtant les flics ne font pas dans la dentelle pour les chasser. Pas mal d’entre-eux garderont des traces des affrontements jusqu’à la fin de leur vie. J’avoue qu’au début cela m’amusait, puis à la longue je me suis lassé. Comme on se lasse de presque tout finalement.
« Votre petit-déjeuner, monsieur Salgrenn… Vous avez bien dormi, monsieur Salgrenn… ? »
Ichtak est mon homme à tout faire. Enfin presque à tout faire. Il est mongolien. De Mongolie. De Mongolie orientale pour être plus précis. Il paraît que c’est un très beau pays. De belles et grandes étendues de steppes à perte de vue. Et des chameaux. Beaucoup de chameaux.
Mon portable vibre sur la table de nuit. C’est Albin. Mon éditeur.
« Hello Salgrenn ! C’est Albin…!
Il m’appelle tous les jours. Même le dimanche. No surprise, donc…
« Bonjour Albin… Que me vaut… ?! »
— Rien… rien… je voulais juste savoir si tout allait bien ce matin… Alors, de l’inspiration, mon vieux… ?! Vous êtes sur quoi aujourd’hui… un nouveau roman… ?
— Non… à vrai dire je ne sais pas trop encore… peut-être un recueil de pensées, ou des aphorismes en vrac, ou pourquoi pas des devinettes…
— Des devinettes… ?! Mais c’est bon ça… c’est très bon même… !
— Savez-vous, mon cher Albin, quel est le comble d’un vigneron têtu ?
— Non, non… mais allez-y… je sens que cela va être génial, comme d’habitude !
—… L’obsession d’avoir toujours raisin sur toute la vigne… !
Je l’entend s’étouffer de rire à l’autre bout. Je crois que j’ai fait mouche une fois de plus.
— Et l’on pourra appeller ça : « Les Versets Salgréniques »… Qu’en pensez-vous… ?!
— Que vous êtes un génie, mon vieux… un génie… ! Bon, je dois vous laisser, j’ai Amélie sur une autre vigne… ! Bonne journée, Salgrenn…
Je petit-déjeune. Avec Mozart. Le midi, c’est avec les Pink Floyd. Et le soir, devant les infos de France 2. J’ai mes petites habitudes de vieux célibataire.
« Ai-je des rendez-vous de prévu ce matin, Ichtak ?
— Oui, monsieur Salgrenn, nous avons une personne qui désire vous entretenir d’un projet cinématographique, enfin, c’est ce que j’ai cru comprendre…
— Du cinoche… ?! Mais c’est bien ça du cinoche ! C’est quand déjà le Festival de Cannes, Ichtak ?
— En Mai… en Mai, monsieur Salgrenn…
— Mais c’est parfait ça en Mai ! Faites-le donc entrer !
Ichtak revient quelques minutes plus tard avec le type du rendez-vous, qui porte un gros pansement sur un œil…
» Cataracte… ?
— Non… Flash-ball… ! Je crois que c’était une très mauvaise idée de venir chez vous un vendredi… !
— Bon… bon… Assiyez-vous donc… !
— Assoyez-vous… la forme correcte du participe présent du verbe asseoir est assoyez-vous, monsieur Salgrenn…
— Oh putain… Je parierai que vous êtes enseignant, vous ?!
— Oui, de grammaire et de style… !
J’ai toujours eu un soucis avec les profs. Quels qu’ils soient, et ce depuis le début. La plupart d’entre-eux, à mon humble avis, confondent malheureusement enseigner et… donner des leçons !
— Alors… De quoi est-ce donc que vous voudriez me causer ?!
Là, c’est un peu trop à la fois pour lui. Las, il ne corrige pas cette fois.
« J’écris des scénarios… quelques-uns ont déjà abouti… comme « Madame-pipi fait du crochet »… vous en avez certainement entendu parler… ?!
— N’est-ce pas ce lamentable navet, avec Catherine Deneuve, qui est sorti l’année dernière… ?!
— Non, non, ça, c’est « Le dernier métro » !
Enfin bref. Il m’entretient pendant presque deux plombes d’un scénard auquel je ne comprend absolument rien. Rien. Absolument rien, que je vous dis. Ce type cause bien, mais on ne comprend pas un mot de tout ce qu’il vous raconte. Alors, je me suis endormi assez vite. Et il a dû s’en apercevoir car lorsque je me réveille, il ne parle plus. Il me regarde seulement, de son œil, unique et bovin. Comme on observe une mouche verte sur une belle bouse fraîche.
— Bien… bien bien tout ça ! Et si vous restiez manger avec moi, histoire qu’on approfondisse un peu la chose… ?!
— Mais… je ne voudrais surtout pas abuser de votre hospitalité… !
— Allons, si je vous le propose, mon vieux, c’est que cela me fait plaisir ! Et c’est comment déjà, votre nom… ?
— Pierre-Valérie Paul-Louis… Mais généralement mes amis m’appelle PV-PL… ou bien parfois PV, pour faire plus court…
— Vos amis… ? Ah… je vois… et pourquoi pas plus simple encore : P ? C’est pas mal aussi, P ?! Non ? Monsieur P… monsieur P… mais regardez donc comme cela sonne bien ! Voilà bien un patronyme dans le vent, ma foi… monsieur P… ! Et puis je trouve que cela va très bien avec votre tête…
— … ?
— Si, si, je vous assure. Vous avez une tête à vous appeller monsieur P… !
— Si vous le dites…
— Bon… Je ne sais pas pourquoi, mais je sens que l’on va bien s’entendre tous les deux, monsieur P… ! Aussi, voilà ce que nous allons faire, votre petit scénario on va le retravailler ensemble, même si je ne vous cache pas qu’il y a du boulot… c’est médiocre, très médiocre, mais on devrait y arriver, je vous le promets… et puis on va en sortir un bon film… Faites-moi confiance là-dessus aussi ; j’ai une grande habitude pour ça… Tout ce que je touche devient de l’or… Et c’est pas moi qui le dit, c’est mon éditeur ! Et croyez-moi, il est bien placé pour le savoir ! Au fait… vous aviez déjà quelque de chose de prévu au mois de mai ?!
— …Non… rien…
Il regarde autour de lui. Le mobilier, les babioles, les tableaux aux murs.
— Oui… c’est bien un Wharol devant vous… ! Je vous le dis avant que vous ne me posiez la question… !
— Et…
Il me montre du doigt le chien gonflable, vert fluo, qui trône dans un coin.
— Jeff Koons… Jeff Koons, monsieur P… C’est très moche mais ça m’a coûté un bras ! Vous-même collectionnez, peut-être ?! Timbres-postes… ?! Ou mieux… des boules à neige ?! Oh oui… je parierais bien pour des boules à neige !
— Non… quelques autographes éventuellement… J’en ai un de Depardieu… sur une note de pressing…
Ichtak passe sa grosse tête par l’entrebaillement de la porte.
» Ah… Ichtak, vous tombez bien, mon ami… ! Monsieur P nous fera l’honneur de rester diner avec nous… Qu’est-ce qui était prévu pour ce midi… ?
— Du canard, monsieur Salgrenn… du canard aux navets…
Anastasia.
Elle a déboulé dans ma piaule comme un furoncle sur un cul sale.
Anastasia. C’est ma gamine. La p’tite dernière que j’ai eue avec ma deuxième femme, une ruskoff, ex-mannequin et ex-potiche d’un footballeur du PSG.
« Papa, dear Papounet, je voudrais être ambassadrice des Déserts, plus tard quand je sera grande… ! »
C’est vraiment pas une réussite cette gamine. Non seulement elle est laide comme un pou, mais pas très vive non plus. Elle cumule.
« Ambassadrice ? Et pourquoi pas Présidente de la République pendant que tu y es ?!
— Mais si, Papounet, je veux faire comme Madame Sigolaine… La vieille dame de la télé… «
Je ne supporte pas qu’elle m’appelle Papounet. Si je ne me retenais pas, je lui foutrais des claques à longueur de journée.
» T’as déjà changé d’idée… ? La semaine dernière tu voulais être vétérinaire comme tout le monde… ?!
— Oui… Ambassadrice des Déserts c’est beaucoup mieux… ! Et puis c’est très bien payé ! Et là au moins je n’aurais pas besoin de mettre mon bras dans le culcul des vaches… Oh, c’est trop sale le culcul des vaches… !
On sait maintenant de qui elle tient celle-là. Sa bimbo de mère me coûte une fortune à entretenir. Et la voilà qui rit à pleines dents maintenant… on devrait l’obliger à porter en permanence un masque, cette petite. Mon Dieu qu’elle est laide, tout de même… !
« …Bon… Ma petite fiente chérie… si tu laissais papa travailler maintenant… ?! Vas donc plutôt raconter tout ça à ta mère, hein, tu veux bien… ?!
— Mais elle est partie faire des courses… chez « Fauchon »… et chez son coiffeur aussi…
Des fois, je me dis que j’aurais mieux fait de m’abstenir. M’abstenir d’avoir du talent, d’écrire des bouquins à succès, d’avoir du pognon à plus savoir quoi en foutre, de rouler sur l’or, d’en avoir plein les fouilles, de me payer des putes russes, et surtout de leur faire des gosses aussi bêtes et moches…
Vivian.
9h30.
Vivian est un garçon charmant. Et l’amant idéal.
Le soleil est déjà haut dans le ciel mais nous sommes encore serrés l’un à l’autre dans ce grand lit. Mon nez dans sa nuque, je rêvasse. Cette fois, j’en suis certaine, je suis amoureuse…
» On devrait se lever tout de même, non ? T’as vu l’heure un peu… ?!
—…Mais on s’en fiche de l’heure… ! On est si bien, là, tous les deux !
Il se tourne et m’embrasse tendrement. Je caresse son beau visage.
—…Vivian…
—… Quoi… ?
— …Non… rien… !
Il m’embrasse encore. Je l’aime…
11h30.
Je reviens du village. On n’avait absolument rien à manger. Tous les placards sont désespérément vides dans cette maison.
« Tu sais, depuis la mort de mes grands-parents, cette maison n’est plus la même. De temps en temps, je viens y passer un week-end… C’est quand même un peu tristounet ici… surtout seul…
— Seul… ? Mais tu n’es plus seul aujourd’hui mon chéri… Je suis là maintenant, avec toi ! »
Vivian s’est mis en tête de mettre un peu d’ordre pendant mon absence. Cet homme est parfait.
Lorsque j’apparais dans l’encadrement de la porte d’entrée, il me sourit. Je frissonne un peu. Toutes les fenêtres de la maison sont grandes ouvertes.
— Tu as froid… ? J’ai aéré… cela sentait tellement le vieux ! Mais si le courant d’air te gêne, on va refermer maintenant… ?
— Non, laisse donc… ça ira… Dis, c’est incroyable ce que les gens du coin sont drôlement sympathiques… je me suis déjà fait plein de copines sur le marché ! Et puis quelques copains aussi !
— Ah bon… ? As-tu trouvé des fraises ? J’adore les fraises !
— Bien sûr ! Et puis de bons fromages de chèvre aussi… tu aimes le fromage de chèvre… ?!
15h30.
Je crois que je n’aurai pas dû boire autant de vin pendant le repas. Du garage, Vivian a sorti deux vieilles chiliennes sur lesquelles nous nous sommes allongés. Il fait si doux dans ce jardin. Je crois que je n’ai jamais été aussi bien de toute ma vie. Je donnerai sans hésiter tout ce que je possède pour que ces instants merveilleux durent une éternité.
— Dis… Est-ce que tu as entendu parler de cette jeune femme habitant le village et qui aurait disparu depuis plus d’un mois maintenant ?
—…Non… Je ne suis pas au courant de ça…
— Pourtant sa photographie est placardée un peu partout… Elle était vraiment très belle, cette fille…
Un nuage passe devant le soleil. Je frissonne encore. Nous ne sommes qu’au début de l’été.
— Et il paraît que ce n’est pas la première qui disparaît ainsi dans la région…
19h30.
Nous avons déjà faim. Et soif aussi. Vivre d’amour peut-être… mais certainement pas d’eau fraîche ! Apéritif sur la terrasse, j’abuse encore du rosé, et Vivian, un peu de moi. Mais je ne m’en lasse pas.
— Tu as pris de belles couleurs cet après-midi…
— Alors passe-moi donc un peu de crème dans le dos, si tu veux… mais n’en profite pas, hein… ?!
Pour le dîner, Vivian propose de nous faire un taboulé. J’adore ça. Il nous faut simplement un peu de menthe fraîche.
— Il y en a là-bas, au fond du jardin… !
Alors je file en ramasser. Quelque chose brille dans la terre et attire mon œil. Une chaîne en or, avec un petit pendentif en forme de cœur. Exactement le même que portait cette jeune femme sur les affiches. Je frissonne encore…
— Tiens, je t’ai apporté un lainage… regarde… tu trembles, mon amour…
Un jour comme les autres.
C’était un jour. Un jour comme les autres. Ni plus, ni moins…
J’étais ivre mort, avachi sur ma table de cuisine, et l’oiseau est entré par la fenêtre grande ouverte. J’ai relevé la tête. Il était là, posé sur la chaise en face de moi. Noir, calme, m’observant de ses grands yeux perçants. Un aigle, peut-être.
Dehors, le silence. Le monde semblait s’être arrêté. Pourtant je n’avais pas peur. Pourquoi aurais-je eu peur après tout ? Que le Monde s’arrête ainsi n’avait désormais plus aucune importance.
L’oiseau me fixait encore. Immobile. Immense. Sondant mon âme. Profondément.
Il a souri, soudain. D’un sourire merveilleux, éclatant de bonheur, calme et noir.
Ses plumes luisaient au soleil. Et il souriait encore… mon oiseau de malheur. Noir, et si calme pourtant.
Ce jour comme les autres…
Ni plus, ni moins…
Tronche de furoncle.
ATTENTION : Contenu sensible.
Il est tôt. Très tôt, beaucoup trop tôt pour une visite, mais il y a pourtant bel et bien quelqu’un qui tambourine à ma porte…
Je m’approche, prudent, en tout cas autant que peut l’être un quidam ayant pas mal de choses à se reprocher.
» Ouvre Mac Cöye ! Mais, ouvre donc… c’est moi… Gouinette !
— Gouinette… ?!
Gouinette est une copine. Du genre collante. Une vraie sangsue.
J’ouvre. Elle est toute en cheveux et même pas maquillée…
— Je t’en prie, entre… qu’est-ce qui t’arrive… ?
— Qu’est-ce qui m’arrive ?! Tu me demandes ce qui m’arrive ?! Tiens, regarde plutôt !
Elle se tourne, lève sa jupe et se baisse…
— Tu le vois mon cul… ?!
— … Oui ! Très bien… je le vois très bien !
— Alors, regarde-le encore de plus près !
Elle écarte ses lobes fessiers ne laissant ainsi aucun doute sur l’origine de son trouble…
— Oh, merde ! C’est quoi ça… ?! Là… ce machin sur ton trou de balle ?!
— Le truc qui fallait pas se choper, Mac Cöye, une belle saloperie, tu peux me croire… ! Allume ta téloche, tu vas vite comprendre le blème !
— J’peux pas… j’ai pas payé la redevance !
— Tu te fous de ma gueule, ou quoi ?! Allume, que j’te dis !
Nous voilà donc maintenant assis tous les deux sur mon canapé, devant la téloche.
Une image apparait sur l’écran… c’est Buse Zinglin, la Ministre de la Santé…
— Putain ! Monte le son, Mac Cöye ! Tu vois pas qu’elle cause ?!
« Chères concitoyennes, chers concitoyens, l’heure est grave… »
— Tu veux pas un muffin aux œufs ? Sont tout frais, je les ai fais la semaine dernière…
— Nein ! Ferme-la donc plutôt, Mac Cöye !
« … Le bouton d’anus, c’est ainsi que nos spécialistes le nomme… une véritable épidémie qui touche l’Europe entière, et bientôt toute la planète, si nous n’arrivons pas à circoncire rapidement la vague qui touche nos fondements de plein fouet… »
— C’est pas plutôt circonscrire, qu’elle voulait dire… ?!
— Ta gueule, Mac Cöye… ta gueule, s’il te plaît !
« Toujours selon nos spécialistes, tous d’éminents troudeballistes reconnus, et ayant pignon sur rue, la seule parade est le port obligatoire d’une culotte… en attendant le vaccin qui ne saurait tarder, bien sûr… »
— Quoi… ?! Une culotte… ?!
— Ouais… t’as bien entendu, Mac Cöye ! Ils vont nous obliger à porter une culotte, ces cons !
— Tout le temps… ?!
— J’sais pas… écoute encore… elle a pas fini !
« … Devant la pénurie de lingerie qui est à prévoir, nous demanderons à nos entreprises textiles de mettre les bouchées doubles… Et nous vous rappelons qu’une culotte ne doit pas être portée plus de trois jours d’affilée, ceci afin de garantir son efficacité… Dès aujourd’hui, et à notre demande, des contrôles systématiques seront pratiqués par les forces de l’ordre, alors respectons toutes et tous les consignes afin que le bouton d’anus soit vain… cu ! … Merci pour votre attention… Vive la République… Et vive la… »
Je coupe le son. Nous sommes encore sous le choc avec Gouinette. On bouge plus d’un poil. Faut dire que des nouvelles comme celle-là ; c’est quand même pas tous les jours que cela vous tombe sur le rable. Et c’est heureux…
Tout d’un coup, Gouinette se relève… Une larme coule délicatement sur sa joue…
— Tu te rends compte… mettre une culotte… ?! Mettre une culotte tous les jours, Mac Cöye… ! Si on m’avait dit qu’un jour ça arriverait, une chose pareille… !