Inflation.

Les « Firsts » d’Air New Zealand sont hyper cosy. De la pure laine de mouton un peu partout. Leur pinard n’est pas mal non plus, je dois l’avouer.
« …Chardourney or cabernette chôvignonne, sir ?… »
L’accent rapeux de mon hôtesse me sort des vapes. Elle a du poil aux pattes, la kiwi, et certainement de nombreuses heures de vol à son compteur, dont une grande partie de nuit et sur le dos, à considérer la taille impressionnante de ses cernes !
Ça m’a pris comme ça, avant-hier matin. Ben, ouais, comme ça ! Un tour du Monde en first classe. But, why not, après tout ? Depuis quelques temps déjà, je tournais en rond chez moi, et c’est grand chez bibi, dans les cinq cent mètres carrés, et encore, c’est sans compter la pool-house et les sous-sols aménagés. Pour tout dire, je m’ennuyais un max. Et tout le monde sait qu’un tel état semi-végétatif n’est jamais très bon pour le moral. Plus tu tournes et vires ainsi comme une loque, plus tu cogites en boucle dans le vide, et plus la situation s’aggrave. Pas bon. Pas bon du tout.
L’escale de deux heures à Singapour m’a permis d’apprendre que la Queen est morte. Drapeaux en berne. Moi, j’ai offert une tournée générale de champagne. L’ai jamais bien kiffé, la Lisbeth deux. Et puis l’autre niais, aux grandes escourdes, ceci qui va prendre sa suite avant même qu’elle soit sous terre, la vieille peau, pas mieux.
Notons qu’il était assez dégueu, leur champ, au salon VIP. Trop de bulles. Un regrettable petit bémol à cette chocking-party improvisée…
Auckland. Enfin, dirais-je. C’est super loin, les antipodes, même en first class. Il pleut des trombes d’eau tiède, et personne ne parle un foutu mot de français, par ici. Tout est noir ou bien gris. Plutôt noir d’ailleurs, comme le chauffeur de ma limousine. Un brave type qui tente une approche dès que j’embarque dans son carrosse qui embaume le cuir ciré et la bombe désodorisante au citron vert.
 » Adorrre la France… misieu ! « 
Ouais, moi aussi, mon coco, et tu vois, c’est pour ça que je me barre dès que je le peux !
Me dit encore, dans son drôle de patois des caraïbes, qu’il a de la famille chez nous, les gentils frenchies. Et, bien entendu, rêve d’aller leur rendre visite un jour… toute une bande d’haïtiens, installés, sans aucun doute, dans des logements sociaux délabrés et crasseux du côté de Châteauroux, ou, peut-être, de Clermont-Ferrand. Comme d’habitude, mon imagination débordante fait le reste du boulot… alors je prends des notes sur mon Iphone 14, histoire de ne pas oublier toutes ces belles images de misère qui défilent si clairement dans ma caboche. Une nouvelle ébauche de projet d’écriture sur un fond très sombre de boat-people vaudouïsé… Pourquoi pas un polar, cette fois ? Découpage à la machette, amulettes criblées d’aiguilles, égorgements à gogo dans des caves qui puent la pisse de rat… Fais chier ! la machine à historiettes ne s’arrête donc jamais, rien n’y fait, même pas le décalage horaire, c’est presque du non-stop dans mon ciboulot de dingo… Gérard de Villiers, sort de mon corps, je t’en supplie ! J’en peux plus… !
Hôtel Sofitel. Face au port de plaisance. Les mats des voiliers vous font un de ces « cling-cling » assourdissant avec le vent qui rafale. Mais, là encore, le grand luxe. Monsieur Salgrenn ne se refuse jamais rien, c’est maintenant bien connu de tous !
Un personnel trilingue, mais tiré à quatre épingles, est au garde à vous devant l’empreinte de ma carte Premium qui donne le ton juste pour la suite à venir. Ma suite, justement… dernier étage, of course, marbres, dorures kitch, moquette wool-mark, mini-bar, et tout le tralala habituel, mais surtout cette putain de vue époustouflante à 180 degrés sur la mer de Tasman vert-grisaille et l’îlot Motutapu… Motutapu, l’île interdite… l’ile sacrée… Là aussi, il a du s’en passer des trucs… immolation tribale, anthropophagie, orgie, dépucelage de vierges impubères pour la bonne cause… tout un programme à fouiller…
Naze, je me jette direct sur le king-size sans enlever mes pompes sales. Chez moi, je l’aurai pas fait, c’est vrai. Chez moi, je fais gaffe à pas saloper. Chez moi, je suis un autre homme. Un être bien civilisé qui salope pas les couvre-lits et qui rote jamais après les repas. Ou alors, discrètos, toujours en loucedé. Mais là, aux antipodes, je me lâche un peu, histoire d’amortir le voyage.
Merde ! 15 000 balles, le trip… ! et faudra compter autant pour le billet retour ! C’est vraiment pas donné, la grande classe ! Faut-il en aligner de l’oseille aujourd’hui, pour avoir son petit confort à soi ! Enfin, je parle de retour… mais en vérité, je ne sais pas encore s’il y aura un retour… pas sûr…
Porqué ? Parce que ! Parce que finalement, la France, ce n’est pas le Pérou. Un joli pays certes, mais peuplé de cons. Oui, je confirme. Des cons par milliers. Des tas de cons qui se lamentent sur leur sort à longueur d’année. Comment ça, tout augmente en ce moment ? Et paraît aussi qu’il n’y a plus de moutarde forte dans les rayons de vos supermarchés ? Ouais, et alors ? qu’est-ce que vous voulez que je vous dise, moi ? Ce n’est tout de même pas de ma faute s’il y a la guerre en Ukraine ! Voyez donc plutôt ça avec monsieur Poutine ! Et puis, oh ! hé ! le pognon, c’est fait pour être dépensé, non ? sinon, à quoi ça sert ? Et attendez, la meilleure de toutes : voilà maintenant qu’on découvre qu’il va faire froid cet hiver, un scoop ! et qu’avec tout ça, on va avoir du mal à se chauffer ?! Ben, z’avez qu’à faire comme moi, les gars : faites vos valises et partez vous dorer les miches au soleil ! Ah, quelle bande de blaireaux, tiens !
Demain, si fait beau, j’irai voir fumer les geysers, à Roturoa. En hélico, bien sûr. J’ai réservé une suite au Prince’s Gate hotel. On m’a affirmé que c’est celle où avait dormi la reine Victoria…

8 Replies to “Inflation.”

      1. J’aime mieux ça !!! Mais le pire, c’est qu’il y en a qui pensent et vivent cette vie… En pissant du haut de leur 500 mètres carrés sur les « pauvres cons que nous sommes », zavaient K pas être pauv, ces cons ! Mais il n’y avait pas de pauvres à parasiter, sur qui faire du bénef, il n’y aurait pas de riches… À méditer 😉
        https://www.lepoint.fr/sciences-nature/notre-civilisation-touche-a-sa-fin-assure-la-nasa-19-03-2014-1803180_1924.php
        Bonne journée quand même en savourant cette belle de civilisation. Si elle peut notre planète, ce qu’il en reste, pourquoi pas !

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  1. Et le pire, c’est que s’il restait des survivants, les mêmes schémas de hiérarchie dans le groupe et d’exploitation et se reproduiraient. À moindre échelle, certes, mais à croire qu’ils sont gravés dans nos gènes. La série « The walking dead »( me suis fait les 11 saisons cet été) , à part les zombies (quoique, lol) est assez réaliste de ce que deviendrait cette (in)Humanité en processus de survie totale. Welcome in the jungle…

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